Les échecs ne pouvaient pas échapper aux
excès qu'on a connu lors de la Révolution Française. Ainsi, en 1793, le citoyen Guyton-Morveaux s'interrogeait
:
"Sera -t-il permis à des
Français de jouer à l'avenir aux échecs ? Cette question fut agitée, il y a
quelques jours, dans une société de bons républicains, et il fut conclu, comme
on devait s'y attendre, par la négative absolu."
"Mais on demanda ensuite
s'il ne serait pas possible de républicaniser ce jeu, le seul qui exerce
véritablement l'esprit ..."
"Tout le monde sait que le
jeu d'échecs est une image de la guerre ; jusque là rien qui répugne à un
républicain ..."
"Ce sera le jeu des camps,
ou si l'on aime mieux de la petite guerre. Le mot échecs a une étymologie
royale ; c'en est assez pour le condamner à l'oubli ..."
"Le personnage principal
sera le porte drapeau, ou pour mieux dire, le drapeau. Il ne sera pas difficile
de donner à la pièce une forme convenable à cet attribut ; elle tiendra la
place du ci-devant roi [...] ; lorsqu'on l'attaquera, on en avertira par ces
mots : au drapeau ; lorsqu'elle sera forcée, on criera victoire ; lorsqu'elle
sera seulement enfermée, on dira blocus ..."
"La pièce appelée si
bêtement reine ou dame sera l'officier général, pour abréger, l'adjudant. Les
tours seront les canons, et l'on ne cherchera plus le rapport de leur mobilité
avec leur dénomination. Roquer sera mettre un canon près du drapeau ; on
l'annoncera en disant : batterie au drapeau. Les fous représenteront la
cavalerie légère, les dragons. Les ci-devant chevaliers étaient déjà descendus
au rang de cavaliers. Les pions formeront l'infanterie [...] quand ils auront
enfoncé le camp ennemi jusqu'à sa limite [...] leur nouvelle marche ne sera
plus que l'image naturelle de l'élévation en grade d'un brave soldat."
Extrait du Moniteur du 20
brumaire an 2 (10 novembre 1793).