Contrairement à une idée reçue, la plupart des joueurs de parties à l'aveugle n'ont pas une image photographique de la position sur l'échiquier à chaque instant. Même si chaque joueur expérimenté est capable de dire instantanément les cases accessibles par une pièce située sur n'importe quelle case de l'échiquier, c'est l'enchaînement des déplacements précédents qui sont le plus souvent mémorisés, la logique de ces mouvements permettant une meilleure mémorisation. Avec un peu d'entraînement, un joueur expérimenté est capable de mener à bien une partie complète (même si son niveau de jeu sera bien inférieur).
Toutefois cette question n'est pas absolument résolue. Après les travaux d'Hippolyte Taine sur la question, pensant pour sa part que les joueurs d'échecs à l'aveugle avaient une mémoire visuelle de l'échiquier, ce qui n'était pas là un cas général et universel, puis après les réflexions d'Henri Bergson qui lui pensait que les joueurs se refaisaient la partie dans leur esprit, en déployant sa théorie de pensée-schéma-image, la question n'a de cessé d'être d'actualité. En effet, Bergson pensait que les joueurs rejouaient systématiquement le début de la partie dans leur esprit afin de retrouver la position actuelle des pièces sur l'échiquier. Or, cela n'est qu'exceptionnel. Christophe Bouriau, ayant interviewé Éric Prié sur ce processus, souligne le fait que les joueurs n'ont pas à se représenter en image les pièces pour mener à bien la partie, mais qu'ils voient « des rapports de force ». La question est donc toujours ouverte sur la question de l'image mentale de l'échiquier.